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雅克.考夫曼Jacques Kaufmann|“瓷的精神”——2021景德镇国际陶瓷艺术双年展艺委会人物专访
2021-10-09 来源:陶瓷美术学院 景德镇陶瓷大学陶瓷美术学院

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雅克.考夫曼 Jacques Kaufmann

人物名片

1954年出生于摩洛哥卡萨布兰卡。1977年毕业于日内瓦应用艺术学院,著名陶艺家,联合国教科文组织国际陶艺学会IAC前任主席,现荣誉主席。

(访谈内容如下)

Q=景德镇陶瓷大学对外文化交流中心 李超

A=国际陶艺学会(IAC)荣誉主席 雅克.考夫曼

Q:作为联合国教科文组织国际陶艺学会IAC前任主席和名誉主席,请向中国的观众简要回顾一下您个人以及IAC与中国陶艺界的关系。

A:在将国际陶艺学会与中国联系起来的近代历史中,出现了很多参与者。1999年许以祺先生邀请我第一次来中国并在广州美术馆做了一个三人作品展览,我常说这是我在陶瓷领域的第三次重生。然后我和广东美术馆合作举办了 18 位中国陶艺家在瑞士、丹麦、德国、美国和中国的巡回展。2002年我开始在富平、唐山、景德镇制作直至 2004年在广州美术馆举办“超越传统”展览。2006年我还应邀在上海大学做了展览。从那以后我每年都会为各种项目去中国一到两次,可以说和中国陶艺界建立了紧密的联系和友谊。

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“The flight of the fly N°2”, Ariana Museum, Geneva, Switzerland 2019

Bricks

100 meters long

       国际陶艺学会和中国的联系最早是在1987年在江西南昌和北京的中国美术馆由前秘书长Mathé Coullery组织过“当代瑞士陶艺”展览。许以祺当选IAC理事会成员的6年任期后中国籍会员数量猛增,同时也通过举办各种会议、座谈会、展览和驻地,邀请了数量可观的国际陶艺家来中国。他是 2008 年西安-富平 IAC 大会的关键人物。这是一个关于中国现代陶艺对外开放重要时期的故事,景德镇当然是这个开放的一个组成部分。1999年IAC在中国有3或4名会员到2021年有超过110名会员。

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“Reflection on the water ”, Fiskars, Finland 2018

Wood structure, bricks

15*5*3.5 m

Q:请谈谈您对陶瓷艺术与现当代艺术运动的关系的理解?

A:陶瓷拥有29,000年不间断的历史,作为一种材料在今天的汽车、空间研究和外科植入物等领域不断发展,其共同点是通过火从根本上改变基础材料的内部结构。在现代艺术进程中,我们发现很多艺术家都曾经与陶艺结缘,像高更和他的陶艺家邻居夏雷 Chaplet一起做陶、毕加索在Vallauris 马杜拉的陶瓷工作室进行创作、米罗与陶艺家胡安.阿蒂加斯Artigas的合作、意大利艺术家丰塔纳本身就是陶艺家还通过直接影响了拜访过他工作室的彼得·沃克斯而影响了今天的全球陶艺。(注:后者在美国发动了著名的现代陶艺运动)。艺术家们以自己的方式在这种媒介中发展了自己的个性和艺术风格,他们对陶艺的兴趣和参与改变了陶艺实践的诸多功能性固有概念。关于陶瓷与当代艺术的关系也愈加紧密,近十年来,我们目睹了大量艺术家们摆脱束缚自己的单一媒介开始跨界陶瓷,2016年在巴黎举办的 Ceramix 展览被描述为一个代表性的例子。以前只属于纯艺术的独特机会常常被置于伟大的艺术史一边。而今天,一个时尚的现象是我们看到许多当代艺术家在做陶瓷作品,许多当代艺术画廊也在力推。

Q:您的作品使用了大量的低温烧制的可循环使用的砖,是什么让您选择这些低温的陶的材料而不是高级的陶瓷材料?

A: 你是指低艺术含量?但是一种材料的“艺术”品质不是通过其实施的复杂性、纯度,甚至是它的抵抗力来衡量的……而是通过其中几乎无法辨别的能否引发观众的共鸣来衡量,而艺术家则热衷于通过创作去激发共鸣。这种关系是一种情感、感觉的问题,艺术家的职责之一当然是“揭示是什么”,也就是说,让别人通过他们的作品感知到他们自己能够看到的是什么。辨别和感受,这超出了作品的明确信息。非洲陶器、南美洲和北美洲的陶器、宜兴的名茶壶、伊朗的枝形吊灯等等都是特定的文化产品,与我选择创作使用的低温砖头相比它们都需要很强的技术性。而我想说砖也有并代表了特定的底蕴和文化。我与砖的相遇可以追溯到 1984 年至 1986 年在非洲卢旺达的两年半时间。在那里,我发现了陶瓷的新尺度:景观尺度。一块砖就是一只鸬鹚,单枪匹马几乎都没有什么作用,但是随着数量的递增到两个,三个,然后越来越多,一个方向被创造出来,一堵墙的开始,从那里就是开创一个巨大的空间和领域的可能性,而且绝对不仅仅是以建筑的竣工而结束。

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The goddess had been sleeping for several eternities , Geneva, 2021

Bricks

20*15 meters

Q:是什么促使您这么多年坚持这个主题和材料?当您开始创作环境陶艺作品时,您最关心的因素是什么?在创作的过程中,您是否关心您作品的完整性和永久性?

A:我努力希望通过创作可以让我接触到无限,也就是说:不可能走到可能的尽头。所以我关注材料、实施过程和作品最后支撑的空间。我第一次使用砖头这种所谓的“糟糕”材料做艺术创作的经历与一次特殊展览情况有关:展场空间很大,备展时间短。所以唤起了我对非洲的记忆,还有砖。比起自己筋疲力尽的在工作室制作然后搬到展厅布展,这些一块块煅烧后的小陶土可以让你马上开始征服空间的工作,并以 1 / 1 的比例直接建造。我开始向一个砖厂借砖,试验并进行我的装置,然后在展览结束后将砖归还。这样的一种经济可行的创作手段,后来不断的被加入了关注地球和人类责任等等内容,然后我被邀请制作其他装置,所以我的工作室工作更多的与摆放、工具和材料的研究相关。创作与空间相关的作品,通常是短暂的装置和展出。在我职业生涯的某一时刻,与在工作室制作并在画廊或博物馆展出的雕塑和其它艺术品相比,我的这些砖为材料的装置作品获得了令人惊讶的更多收入。这些作品虽然具有短暂的性质,当然也有永久性装置的作品,其中就包括在中国宜兴的一个名为“互园”的装置,至今仍可见。对我而言,我不会将作品的耐久性问题与其艺术价值联系起来。有高质量的作品才是最重要的。

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“Autumn leave”, Xintiandi Park, Shanghai Biennale, China 2014

Bricks, bamboos

15*8*5 m

Q:请谈谈您对“瓷的精神”-2021景德镇国际陶瓷艺术双年展的期待和寄语。

A:中国(来自China Clay:瓷器或高岭土,来自高岭的材料等)是欧洲人对这个在文化上与陶瓷和瓷器有着密切的联系的特定国家的称呼。虽然指定其内部居民的名称是:“中间国家”的人民,但那是另一种意义重大的语义游戏,人们在各种情况下都会发现,人类学对人口或国家,归属于领土内部,或来自领土外部。中国因此是全球集体想象中的瓷器之乡。景德镇因陶瓷而成为中国乃至世界之都。景德镇陶瓷大学是景德镇的旗舰名片之一,因此,这所大学和双年展完全有理由成为陶瓷领域的灯塔。我希望这个由景德镇陶瓷大学具体实施的双年展能够对全球范围内的陶艺实践的多样性尽可能的张开臂弯,就像打开一扇以陶瓷的名义的窗户一样。我希望双年展会有各种形式的表达,传统的和当代的,艺术、设计、建筑或科学方面的最好的研究以及对相关前沿陶瓷材料的研究的呈现。今天人类的挑战之一就是如何合理的可持续性的使用资源、原材料和能源方面。最后,我希望这项国际重要的陶艺展览和赛事将激发大家去重新考虑艺术和陶瓷工艺及实践之间的界线和等级关系成为可能,让所有人都有权因其对全球陶瓷文化的贡献而受到更多的认可和重视。

Q:En tant que président émérite de l'IAC, veuillez présenter brièvement vos relations et celles de l'IAC avec les céramistes chinois à nos téléspectateurs. 

A:Divers acteurs sont présents dans l’histoire récente qui relie l’AIC avec la Chine. Il est pour moi difficile de séparer clairement mes propres relations au sein de la communauté des céramistes en Chine et l’AIC. Je m’explique.

En 1998, un homme visite une galerie d’art contemporain, Andata Ritorno à Genève, dans laquelle je suis en train de mettre en place des installations céramiques. Il s’agit de Mr Hsu Ichi, qui se présente comme venant de Chine, et qui aimerait assister à mon travail en cours, faire des photos, etc… Après 3 heures de travail, celui-ci m’invite à aller manger, dans le premier restaurant chinois proche de la galerie, avec mes deux assistants. Durant le repas, il me dit : Mr Kaufmann, ce que vous faites est très intéressant, on ne trouve pas cela en Chine. Et peu après il ajoute : peut-être vous auriez de l’intérêt, si je vous organise un voyage en Chine. Vous pourriez rencontrer des artistes, des artisans, des entreprises, des Universités, donner des conférences. Je pense : cet homme parle, on verra bien. Deux semaines plus tard, je reçois un courriel disant : vous arriverez par Beijing, puis vous irez à Shanghai, Yixing, Jingdezhen, Xian, enfin Guangzhou, Foshan, et vous repartirez par Hongkong. Durant tout votre voyage, vous aurez une traductrice avec vous pour vous assister (Wang Haichen, Shanghai). Il ajoute : vous prendrez à votre charge le vol international, et je paye tous vos frais durant ce mois en Chine. De l’intention à la réalité, difficile de refuser … Et c’est ainsi qu’en 1999, s’effectue mon premier séjour en Chine, que je mentionne souvent comme ma troisième naissance à la céramique. Je donne donc des conférences, rencontre beaucoup de gens. Lors de l’avant dernière conférence, au Musée d’Art de Canton, le directeur de l’époque, Mr Wang Huangsheng me propose à la fois une exposition personnelle, que je transforme ensuite en exposition tri-personnelle, et me demande si je verrai la possibilité d’inviter en Suisse des artistes contemporains chinois. Cette demande débouche d’une part sur une exposition itinérante de 18 céramistes chinois, en Suisse, Danemark, Allemage, USA et Chine**. Et d’autre part sur une exposition au Musée de Canton en 2004 « Beyond traditions ». Je choisis de venir travailler en Chine plutôt que de travailler dans mon atelier et expédier mes pièces. En 2001 je visite donc des lieux de travail possible, et en 2002, je viens travailler en Chine (Fuping, Tangshan, Jingdezhen). En 2003 je reviens pour finir mes travaux, et je reviens encore en 2004 pour installer l’exposition de Canton, qui est ensuite présentée à l’Université de Shanghai en 2006 (invitation : Chen Guanghui). Depuis ce temps-là, hors de la période Covid, je viens entre 1 et 2 fois par an en Chine pour toutes sortes de projets, développant un réseau amical et professionnel qui ne s’est jamais démenti.   

Pour en venir à l’AIC, en 1999, il y avait seulement 3 ou 4 membres AIC chinois, qui par ailleurs protégeait bien leur fauteuil, sans volonté d’ouvrir le cercle. Il y avait bien eu auparavant une exposition : « Céramique Suisse contemporaine » à Nanchang et au Musée National d’Art de Beijing, en 1987 organisé par Mathé Coullery, Secrétaire Générale IAC de 1979 à 1994. 

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“Tang wall / staying, running”, Art and History Museum,  Neuchatel, Switzerland 2006

Tiles with Tang Sançai glaze

400*320 cm

Après otre rencontre avec Hsu Ichi, j’ai soutenu sa candidature pour devenir membre de l’AIC, puis membre du Conseil, au sein duquel il a été particulièrement actif de 2006 à 2012. Lui a succédé au sein du Conseil de l’AIC : Zhou Guangzhen (2014-2020), et depuis 2020 Wan Liya, de Qingdao, pour un mandat de 6 ans.

Hsu Ichi a intensément œuvré à ouvrir des portes : d’une part en agrandissant fortement le cercle des membres chinois de l’AIC, mais aussi par l’organisation de diverses rencontres, symposiums, expositions, et résidences, mettant fortement en lien la Chine et invitant un nombre impressionnant d’acteurs internationaux de la céramique à venir en Chine. Il a été l’acteur clé du Congrès IAC de Xian-Fuping en 2008. 

J’ai donc pu voir concrètement sur 20 ans un essor remarquable du lien entre l’AIC et la Chine, ce lien ayant été partiellement initié par une invitation presque fortuite en 1998, c’est-à-dire largement avant ma présidence de l’AIC (2012-2018).

Il y aurait certainement une histoire à écrire sur ce temps particulier de l’ouverture de la Chine et de sa céramique avec le monde, Jingdezhen entre autres étant une partie intégrante de cette ouverture. C’est dans ce contexte que je rencontre également toute une série de jeunes artistes de l’époque, qui sont tous et toutes devenus des piliers de la céramique contemporaine chinoise, et avec qui le lien a pour la plupart perduré dans le temps.  

Quelques chiffres :

- 3 ou 4 membres en 1999

-16 membres en 2007

- plus de 110 membres en 2021

Q:Votre compréhension de la relation entre l'art céramique et les mouvements artistiques modernes et contemporains ? 

A:La céramique a 29.000 ans d’une histoire ininterrompue, faite à la fois de secrets et d’intenses mouvements d’échanges.

3 archétypes ont donné leurs fondations à cette histoire :

- La sculpture tout d’abord, dont la fonction de l’ordre du symbolique est de prendre en charge les besoins spirituels de l’humanité s’adressant au divin, avec comme emblème la déesse de Vestonice (- 29.000 ans),

- Les besoins du quotidien, avec le récipient (-13.000 ans),

- Et enfin la brique (Jericho, Palestine, -11.000 ans), qui en se constituant en murs, couvre les besoins de protection de l’humanité pour ce qui est de la vie de la famille, son intimité, et également de séparation, entre espaces publics et privés.

Depuis lors, la céramique a constamment développé ces 3 branches, ouvrant des voies à l’Art, au Design, et fournissant ses constituants à l’architecture. Dans ces 3 domaines, le génie du lieu, la culture et les matériaux locaux ont fait que ce sont développés des pratiques avec des identités culturelles spécifiques, à partir et au sein du tronc général « céramique ».

Comme céramiste, il ressort de cette longue chaine que tous, autant que nous sommes, nous sommes des maillons qui tentons de contribuer au mieux à l’évolution, et donc aux ramifications de ces branches principales. La science récente a ouvert de nouvelles voies, que ce soit pour la recherche spatiale, les implants chirurgicaux, etc … avec toutes sortes de nouveaux matériaux dont le point commun est un passage au feu qui transforme radicalement la structure intime du matériau de base.

À l’époque Moderne, nous trouvons des artistes comme Gauguin (avec le céramiste Chaplet), Picasso (au sein de l’atelier Madoura à Vallauris), Miro (avec Artigas), Fontana (céramiste et artiste qui à Albisola/Italie a influencé le monde de l’art, et plus particulièrement le mouvement céramique aux USA à travers Peter Voulkos qui lui a rendu visite). Ils ont, à leur manière, développé leur personnalité au sein de ce médium, et leur intérêt pour celui-ci à participé à l’évolution des pratiques.

En ce qui concerne le rapport de la céramique à l’Art Contemporain, nous assistons depuis une dizaine d’année à un regain d’intérêt notable de la part d’artistes, répondant d’une part à l’air du temps qui veut qu’un artiste ne puisse se focaliser ni se lier à un seul médium (en Occident en tout cas), et d’autre part permettant de « coloniser » d’une certaine manière un territoire, imaginant révolutionner celui-ci (exposition Ceramix, Paris, 2016, décrite comme une exposition majeure offrant « l'occasion unique de redécouvrir cet art bien souvent mis sur le côté de la grande Histoire de l'Art »). Il y a donc certainement aujourd’hui une mode en faveur de la céramique, et on voit ainsi de nombreux artistes développer un travail avec ce médium, et les galeries d’art contemporain qui les représentent les pousser à le faire. Mais qui dit mode, dit également passage de la mode. Je fais personnellement une différence, non pas en termes de qualité d’œuvres, mais dans la forme d’implication, entre ceux qui font d’un médium, ici la terre, leur médium, avec ceux qui le pratique parmi d’autres, en passant. J’appartiens, et je revendique, de participer à cette longue chaîne de transmission qui a traversé le temps, trouvant pour chaque époque à la fois son appartenance à cette histoire et le chemin de son renouvellement. Pour moi, l’imaginaire part du matériau, ici la terre, qui me permet de m’incarner. Alors que personne ne peut revendiquer l’invention de cette pratique, ce que nous pouvons, c’est au mieux d’apporter à notre niveau une contribution à un champ anthropologique et culturel extraordinaire.

Q:Vos travaux utilisent beaucoup de briques et de matériaux de tuiles à basse cuisson, qu'est-ce qui vous fait choisir ces matériaux de faible qualité plutôt que des matériaux céramiques de haute qualité 

A:Faible qualité, dites-vous ? Mais la qualité « artistiques » d’un matériau ne se mesure pas à la complexité de sa mise en œuvre, sa pureté, voire sa résistance … Mais bien aux résonnances que l’ont peu discerner en lui, et que l’on s’attache à révéler. La relation est affaire d’affect, de sensation, et c’est certainement un des rôles des artistes de « révéler ce qui est », c’est-à-dire de faire percevoir à autrui, par le biais de leur travail, ce qu’eux-mêmes ont pu discerner et ressentir, et cela au-delà du message explicite d’un travail.  

La poterie Africaine, celle des Amériques du Sud et du Nord, pratiquées par les Indiens natifs, les lustres Iraniens … sont des productions culturelles qui toutes résonnent de leurs particularités, au-delà de leur technicité, souvent et néanmoins complexe.

Les briques de Lumu, à la cuisson enfumée, sont issue de cette terre venant des confins montagneux de l’Himalaya, pour arriver à Suzhou, (ou à Yixing), un si long voyage, et que le génie des potiers locaux ont permis de muer en briques pour les palais impériaux pour ce qui concerne Lumu, ou en théières fameuses dans le monde entier pour Yixing.

La porcelaine bien sûr, et ses difficultés, la technicité qu’elle requiert, ne peut et ne doit pas être comparée à celle de briques et tuiles, qui néanmoins, témoignent également d’un sous-sol spécifique, et d’une culture.

Ma rencontre avec la brique date d’un séjour de deux ans et demi en Afrique, au Rwanda, entre 1984 et 1986. Je découvre là une échelle nouvelle pour moi pour la céramique : celle du paysage, alors qu’en Europe, je ne connaissais la céramique que dans une échelle liée à la main, au bras, et parfois au corps. J’ai découvert qu’une brique, c’est un fragment de colombin, ce n’est presque rien, en tout cas toute seule. Mais avec deux, puis trois autres et d’autres encore qui s’ajoutent, une direction se crée, le début d’un mur, et à partir de là un champ énorme d’investigation de l’espace est possible, à des fins qui ne sont pas seulement architecturales. (Image référence Rwanda)

Q:Qu'est-ce qui vous a motivé à vous en tenir à ce thème et à ce matériau pendant tant d'années ? Quels sont les facteurs qui vous préoccupent le plus lorsque vous commencez à créer une œuvre céramique environnementale ? Vous vous souciez de la pérennité de votre œuvre en cours d'installation ? 

A:Dans mon système de création, je distingue 3 pôles, dont je dis qu’ils me permettent de toucher l’infini, c’est-à-dire : l’impossibilité d’aller au bout des possibles. Dans un des côtés, nous trouvons le matériau, le second est lié aux processus de mise en œuvre, et enfin, dans le troisième pôle : l’espace.

L’espace résonne en nous que nous en soyons conscients ou non. Il autorise toutes sortes d’entrées possibles : l’espace physique, lié à ses constituants concrets, l’espace historique, culturel, économique. L’espace suscite des affects, des sentiments. Il provoque des réactions menant à des positionnements et des réponses.

Lorsque, en termes créatifs, se posent la question d’une réponse artistique, je mets l’un ou l’autre de ces pôles au centre de ma réponse, en sachant que de toutes manières, les deux autres pôles également contribueront à leur manière.

Mes premières expériences d’artistes avec des matériaux dits « pauvres » sont liées à des circonstances particulières : un grand espace à investir, et pas de temps pour effectuer ce travail à l’atelier. J’ai donc convoqué mes souvenirs d’Afrique, et la brique, ce petit bout de terre cuite qui permet de conquérir l’espace, pour réaliser un travail d’installation, et de modeler directement dans l’espace à l’échelle 1/1, sans m’épuiser. J’ai emprunté des briques à la première briqueterie à côté de chez moi, j’ai expérimenté puis réalisé mon travail, et puis j’ai rendu les briques après l’exposition, dans une sorte d’économie des moyens et d’énergie, bien avant la préoccupation planétaire et la responsabilité que ce sujet impose.

Puis on m’a demandé de réaliser d’autres installations, ce qui fait que mon travail d’atelier, plus lié à la recherche sur des gestes, outils et matériaux, s’est doublé d’un travail lié à l’espace, avec des installations souvent éphémères. À un moment de ma carrière, j’ai eu étonnement plus de revenus avec des travaux d’installation en briques ou tuiles, et de nature éphémère, qu’avec des travaux sculpturaux ou d’objets, réalisés à l’atelier, et exposés en galeries ou Musées. Et puis il y a eu également des commandes d’installations pérennes, dont plus particulièrement une en Chine, à Yixing, intitulées « HU Garden », qui est toujours visible.

Pour moi, je ne lie pas la question de la pérennité de l’œuvre à sa valeur artistique. Il est des œuvres éphémères et pérennes de qualité, et c’est ce qui compte de réaliser.

J’aime l’idée, au-delà d’une intervention pérenne ou non, de considérer l’artiste comme un médecin, ou un chamane de l’espace, répondant selon le cas à celui-ci, et le considérant comme un partenaire dans la réponse.

Q:Les briques et les tuiles sont censées créer un abri pour les êtres humains. Les vides et les failles entre les briques et les tuiles dans certaines de vos œuvres apportent au public un sentiment d'instabilité. Y a-t-il une considération philosophique derrière cela ou est-ce juste un effet visuel ? Par ailleurs, alors que vos premiers travaux semblent de nature abstraite, vos récents travaux d'installation extérieure semblent être devenus plus figuratifs. Pourquoi ces changements ont-ils eu lieu ? 

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“ spiral Qi”, Clarch Museum Gimhae, Korea 2015

Tiles, bamboos

12*7*7 m

A:Dans le monde rationnel, les briques et les tuiles sont effectivement destinées à créer un abri, accomplissant ainsi un des besoins de protection, qui est fondamental pour les êtres humains. Mais je ne suis pas architecte, et en tant qu’artiste, l’emploi que je fais de ces matériaux est libéré des contraintes fonctionnelles, ce qui me permet d’aborder tout un espace fictionnel. C’est ainsi que les vides entre les briques fonctionnent comme un jeu de la géométrie dans les formes, la lumière travaillant à révéler ces espaces, ces vides dans les courbes. Là où les joints, dans l’architecture, sont destinés à remplir leur fonction de solidité, de stabilité, les vides des joints pour moi permettent de lire la forme, sa genèse, tout comme sa fragilité relative. Il en est ainsi pour tout mur monté à sec, sans colle ni ciment.

« Et pourtant, ça tient » : il y a dans ce paradoxe un élément, dont vous interrogez la source philosophique, et qui m’intéresse. Effectivement toutes nos constructions, mentales ou réelles, sont fragiles, et il suffit de peu pour qu’une certitude se transforme en anxiété, lorsque ce qui semblait sa réalité immuable s’efface. Il y a un lien entre stabilité et certitudes, tout comme entre vertige et doute, avec qui la psyché humaine entre en résonance.

Si mes premiers travaux d’installation pouvaient sembler abstraits, ils étaient en réalité figuratifs au deuxième degré. Je prends l’exemple des travaux liés à la naissance de mon premier fils en 1993, et au vertige de la vie que ce moment a représenté pour moi. Les titres des œuvres en sont témoins : « Mur enceint », « Vertige » « Opening night », « Séparation », « Membrane », « Une forme de l’infini ».

J’ai exploré également par la suite avec les murs ou d’autres installations en briques et/ou tuiles la possibilité d’écrire littéralement dans l’espace (Installation permanente « An » à Yingge Museum, New Taipei). Même si personne ne peut concrètement lire les lettres ou calligraphies, elles sont bien là comme source.

Qu’ils soient apparemment abstraits ou figuratifs, finalement peut m’importe : je travaille plutôt sur des archétypes, la dernière pièce présentée dans un parc au bord du lac à Genève : « La déesse dormait depuis plusieurs éternités » offrant deux visions : celle depuis le sol, de nature abstraite pour nous autres humains, et celle vue du ciel, lisible par les Dieux, les oiseaux ou les drones … Et révélant la figure archétypique d’un être reposant sur la pente herbeuse. (Images à joindre)

Que l’on puisse on non reconnaître la figure n’est pas important pour moi, dans la mesure ou la perception du réel que nous avons est de fait toujours imaginaire : nous imaginons ce qui est, qui est perçu par chacun avec ses propres références.

Dans l’art, il ne s’agit pas forcément de comprendre ou reconnaître. Ou alors ce mot est à prendre dans son sens premier : naître avec. L’art n’est ni marketing ni communication au premier degré. Il nécessite parfois une perception lente, par étapes, finalement toujours partielle.

Que ce soit donc à travers les matériaux utilisés, briques ou tuiles, que dans la manière de les organiser, il s’agit bien pour moi d’une approche sur des archétypes, et dans le cadre d’un imaginaire qui sollicite parfois des tonnes pour se manifester !

Q:Votre message et vos perspectives pour la prochaine Biennale internationale d'art céramique de Jingdezhen.

A:La Chine (de China Clay : porcelaine ou kaolin, matière provenant de Gaoling …) c’est le nom donné par les européens à ce pays particulier par ses matériaux et sa culture profondément liés à la céramique, à la porcelaine. Alors que le nom donné pour désigner ses habitants de l’intérieur est : les gens du « Pays du Milieu », il y a là un jeu sémantique qui est signifiant, et que l’on retrouve dans diverses situations, l’anthropologie s’intéressant aux noms des populations ou des pays, attribués de l’intérieur d’un territoire, ou donné depuis l’extérieur de celui-ci. La Chine donc, c’est le pays de la porcelaine dans l’imaginaire collectif.

Jingdezhen est une capitale, en Chine et pour le monde, à cause de la céramique.

Jingdezhen Ceramic University, est une des Institutions phares à Jingdezhen, uniquement dédiée à ce médium, à ses expressions, quelles appartiennent à l’un ou l’autres des 3 grandes branches que nous avons abordées précédemment : l’art, le design, l’architecture.

Cette Université, et cette Biennale, ont donc toute légitimité pour devenir un phare dans le domaine de la céramique.

Je formule le souhait que cette Biennale, mise en œuvre par JCU soit la plus ouverte possible à la diversité des pratiques dans le monde, à la manière d’une fenêtre pour la céramique.

J’espère que s’y retrouveront des expressions de toutes sortes, d’essence traditionnelle et contemporaine, qu’on y trouve le meilleur de la recherche en art, design, architecture, ou sciences, que soient présentées des recherches sur les matériaux relevant les défis de l’humanité d’aujourd’hui en termes de respect dans l’utilisation des ressources, matières premières et énergie. J’espère enfin que cet effort permettra de reconsidérer les hiérarchies entre pratiques dans le monde l’art et dans le monde de la céramique. Toutes sont légitimées à être reconnues et valorisées pour leur contribution à la culture céramique globale.

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“瓷的精神”-2021景德镇国际陶瓷艺术双年展全球共征集作品2640余件,经全球评审委员会专家两轮公正、公平的评审,评审结果已经公布在双年展网站(www.cjicb.com)首页,请诸位参展艺术家注意查看!  

第三轮获奖作品评审将采用线下实物评审并结合国外专家线上评审得出最终的获奖作品(评审时间另定)。入围作者接到邮件通知后请在规定时间内根据作品寄送要求将实物作品运抵景德镇陶瓷大学美术馆,收件时间:10月30日-11月10日(逾期不予受理)

请一定确保作品包装的规范和安全性,严格根据寄送要求包装、寄送作品(寄送作品须知请及时关注双年展网站及入选艺术家邮箱)。

寄送地址:江西省景德镇市景德镇陶瓷大学(湘湖校区)美术馆“双年展组委会办公室”。

收件人:

余上(手机:189 7985 3205)

陈隽(手机:139 7985 6371)